INTERVIEW - David Guest


La première fois que j'ai rencontré Michael, il avait 11 ans et il était déjà très célèbre. Les Jackson Five étaient les plus chauds au monde à ce moment là. Je vivais en bas de chez eux à Encino. Je suis devenu ami proche avec Tito et Michael après que mon ami Mike Merkow m’ait présenté à eux à Walton School à Panorama City. Michael faisait une girafe en papier mâché la première fois que je l'ai rencontré. Nous avons parlé d'art et il m'a raconté comment il aimait la peinture et la créativité. J'ai tout de suite su que nous avions quelque chose en commun - et ce n'était pas la peinture !



J'ai commencé à sortir avec sa sœur La Toya. C’était un flirt, rien de sérieux. Un jour qu'elle était malade, Michael m'a demandé si je pouvais l'emmener voir une exposition de souvenirs à Glendale. J'ai dit : "une exposition de souvenirs ? C’est quoi ? " et il a dit : "tu dois venir David, tu vas adorer." Donc je l'ai conduit à cet expo où il ils vendaient des vieux rocks et des posters d’anciennes stars, des disques d'or, des articles des Beatles et des objets signés par Jimi Hendrix et Jim Morrison des Doors. Michael aimait les Doors et leur musique. Il aimait aussi tout Motown. Pour nous deux, James Brown était un dieu et Jimi Hendrix était son brillant élève. Après cela, nous avons commencé à traîner 3 ou 4 fois par semaine et ça s'est transformé en meilleurs amis. On était devenu inséparables pour les six prochaines années.

Une nuit, à la fin de son adolescence, on est allé au Roxy sur Sunset Strip pour voir les Four Tops. On est allé dans les coulisses avec Stevie Wonder, et Michael a dit au chanteur du groupe des Four Tops, Levi Stubbs Jr : "J'ai tout appris de vous Levi, tout." Stevie a pris Michael, l’a jeté contre le mur et a commencé, "Vous avez tout appris de qui ? Qui est le plus grand ? et Michael a dit : "Vous, Stevie ! Arrêtez ! C'est vous !" C'était si drôle. On faisait des ballades ensemble tous les weekends juste pour s’éloigner de la maison, de nos parents et être livrés à nous-mêmes.

On montait dans la voiture et on chantait des chansons ensemble. Il avait l’habitude de me dire que j'étais le pire chanteur qu'il ait jamais entendu ! Il m'a toujours fait rire. Michael avait un grand sens de l'humour que la plupart des gens n'ont jamais vu. On aimait aller chiner du mobilier et des peintures ainsi que des souvenirs. Ce qu’on préférait était de marcher dans un magasin et dire : "Avez-vous des peintures de John LeCockah ?" L'antiquaire répondait : "Nous avons tout juste vendu la dernière à 100 000 $ ". Je disais à Michael : "Oh non, il vient de vendre la dernière peinture de John LeCockah". Nous lui suppliions d’en avoir une autre à l'intérieur et il répondait : "Elles sont tout simplement trop difficile à trouver". Alors on sortait et on se disait : "on achètera jamais rien ici, car il ce peintre là n’existe pas ! " Michael rirait si fort. Il avait un rire qui était comme un couac : Hhk Hhk Hhk Hhk Hhk.



On faisait des choses normales. On allait beaucoup au KFC. Michael pensait que si on enlevait la peau du poulet, il était biologique. Je n'ai jamais compris ce que ça voulait dire. On aimait sortir manger des crêpes et des toasts français et je voulais conduire sa Rolls-Royce. Lorsqu’on s’arrêtait pour de l’essence, je lui demandais de remplir le réservoir. Il disait : "Je suis la star ici. Je ne peux pas croire que tu me fasses mettre de l'essence dans la voiture." Et je lui disais : "Quand on est ensemble, il n'y a qu'une seule star." C'est la raison pourquoi notre amitié était si bonne. Je ne l'ai jamais traité comme s'il était une marchandise.

Une fois, dans les années 80, il s’était habillé comme un cheikh et on était allé à Disneyland pour voir Captain Eo, ce film en 3D dans lequel il jouait. Je le regardais faire le Moonwalk, et à la sortie je lui dit : "Tu sais, t’es vraiment bon." Et lui : "Ça y est, tu viens juste de t’en apercevoir ? "

Il n'a jamais été du genre à mâcher ses mots. Au début, il dirigeait et contrôlait totalement sa propre carrière. Il appelait le président de Sony et disait : "Je veux un panneau d'affichage ici. À Chicago. À New York, au Times Square." Il était au-dessus de tout, de la commercialisation à la promotion de chacun de ses communiqués, et il était brutal. Il n’était pas bon de le retenir quand il se mettait en colère. En outre, il ne parlait jamais avec cette haute tonalité vocale. Il était toujours très masculin, un vrai homme.



Tout a changé après l'incident en 1984. Il faisait une publicité pour Pepsi et sa tête a pris feu. Il n'a jamais été le même après ça. Lorsque vous avez une commotion cérébrale et que vous êtes constamment dans la douleur, tout dans votre monde change. Croyez-moi, je le sais par expérience personnelle. Ce n'est pas étonnant qu'il soit devenu accro aux pilules. Je souhaitais simplement qu'il ait les bonnes personnes autour de lui. La vérité est que certains des médecins qui l'entouraient étaient plus intéressés pour être son ami plutôt que de s'assurer que tout allait bien médicalement.

Michael était également si soucieux de son physique. Il était beau au départ et n'avait pas besoin de faire quelque chose, mais la chirurgie plastique était une obsession. C’est allé trop loin et je pense qu'il l’a compris que plus tard dans sa vie. Le chirurgien n’aurait jamais dû faire la seconde opération du nez, mais les gens voulaient le garder dans la bergerie, et ce fut l'un des gros problèmes dans sa vie.

Lors du procès de 1993, j'étais l'une des rares personnes à aller dans chaque émission de télévision aux Etats-Unis et à déclarer qu'il était innocent. Je savais qu'il était innocent. Était-ce la chose la plus intelligente d'avoir tous ces enfants sur votre lit à regarder la télévision ? Non, et je le lui ai dit. Mais a-t-il fait quelque chose de mal ? Non. Michael ne ferait pas mal à une mouche. Il n'était pas comme ça.



Michael avait un cœur d'or. Je voudrais que les gens puissent connaître tous les enfants qu'il a aidés. Les enfants qui avaient besoin de prothèses et aux jambes, mais dont les familles ne pouvaient pas se le permettre. Il payait pour des centaines de traitements contre le cancer mais il ne s’en vantait pas. Personne ne comprenait à quel point il était merveilleux jusqu’à sa mort.

Il était un père très strict. Il croyait que ses enfants devaient être instruits et avoir le respect pour les adultes. Il leur donnait tant d'amour parce qu'il avait été très mal étant enfant, pas à cause de sa mère qu'il aimait beaucoup, mais il n'a jamais été proche de Joseph. Il avait peur de lui.

Je n'ai jamais été un gros pleurnichard, mais j'ai pleuré quand j'ai entendu la nouvelle de sa mort. Je me souviendrai de Michael comme l'une des personnes les plus drôles que j'ai jamais rencontrée et comme quelqu'un qui voyait le bien en chacun de nous. Quelle grande qualité. Il n'a jamais été quelqu’un qui descend les autres. Il vous faisait toujours sentir comme si vous étiez précieux.



Je crois vraiment qu'il était le plus grand artiste de tous les temps. Je suis heureux qu'ensemble, on ait formé une compagnie et que j'ai produit le show de télévision musicale à l’audience la plus élevée de tous les temps au Madison Square Garden à New York en 2001. Il s'agissait de notre couronnement en tant que meilleurs amis. C’étaient les deux concerts de charités les plus élevés de tous les temps.

Sa mort a amené les gens à se rappeler ce qu’est la grande musique, quelle superbe danse qu’il nous a donnés et combien il était polyvalent en tant qu'artiste. Il a été capable de s'adapter à toutes les périodes et rester contemporain. Il pouvait chanter n'importe quoi, mais la chanson de lui que j’écoute toujours dans la voiture est "Man In The Mirror". Pour moi, c’est sa plus grande. Non seulement je me sens profondément concerné par cette chanson, mais c’est aussi le reflet de ce qu’était Michael.



Edition The Guardian du 13 Décembre 2099